Rompre un contrat d’apprentissage : enjeux et conditions

Rompre un contrat d’apprentissage peut sembler complexe, voire intimidant, tant pour l’apprenti que pour l’employeur. Pourtant, il existe un cadre légal précis qui encadre cette démarche, qu’elle intervienne pendant la période d’essai, à l’initiative de l’une des parties ou sur décision administrative. Que vous soyez concerné par une démission, un licenciement ou un accord amiable, comprendre les conditions, démarches et délais est essentiel pour éviter tout litige. Cet article vous propose un guide clair et complet pour naviguer sereinement dans cette situation souvent délicate.

‍

Le cadre légal de la rupture d’un contrat d’apprentissage

La rupture d’un contrat d’apprentissage ne s’improvise pas. Elle est strictement encadrée par le Code du travail et doit respecter des conditions précises selon le moment et la personne à l’origine de la rupture. Il est donc essentiel de bien comprendre la différence entre période d’essai et contrat en cours, ainsi que les acteurs pouvant légalement initier la rupture.

Distinguer période d’essai et contrat en cours

La période d’essai constitue une phase initiale du contrat d’apprentissage pendant laquelle chaque partie peut mettre fin à l’accord sans justification particulière. Sa durée est de 45 jours, consécutifs ou non, de formation en entreprise.

Durant cette période :

• L’apprenti ou l’employeur peut rompre librement le contrat.
• Aucun motif n’est exigé, mais un écrit est fortement recommandé.
• Il est conseillé de notifier la rupture par courrier recommandé avec accusé de réception ou via un autre moyen conférant une date certaine, afin de préserver une preuve en cas de litige.

Au-delà de ces 45 jours, la situation change. Le contrat devient plus protecteur et sa rupture est encadrée par la loi. Elle ne peut alors intervenir que :

• À l’initiative de l’apprenti ou de l’employeur, mais sous conditions,
• D’un commun accord entre les deux parties,
• Ou sur décision de l’administration compétente.

Dans tous les cas, des motifs légitimes et des démarches précises sont exigés pour respecter la légalité de la procédure.

Qui peut initier la rupture ?

La rupture du contrat peut être engagée par :

• L’apprenti, dans le cadre d’une démission ou suite à des manquements de l’employeur,
• L’employeur, en cas de faute grave, d’inaptitude ou d’un autre motif recevable,
• Les deux parties, par accord mutuel,
• L’administration, dans des cas exceptionnels liés à la sécurité ou à la conformité du contrat.

Chaque situation doit respecter un cadre légal ou conventionnel précis, et la rupture ne peut jamais être abusive ou discriminatoire. Ainsi :

• Il est obligatoire de formaliser la décision par un écrit, comportant une date certaine.
• Ce document servira de preuve en cas de désaccord ultérieur, et doit être archivé soigneusement.

Pour toute rupture, un minimum de formalités administratives est requis : informer le centre de formation (CFA), transmettre les documents à l’OPCO, et veiller à la bonne transmission des pièces à l’apprenti ou à l’employeur.

‍

Les cas de rupture à l’initiative de l’employeur

Si l’objectif d’un contrat d’apprentissage est de former un jeune en alternance, il arrive que certaines situations contraignent l’employeur à envisager sa rupture. Toutefois, cette décision ne peut pas être prise de manière unilatérale ou arbitraire. Elle est strictement encadrée et ne peut reposer que sur des motifs recevables, accompagnés d’une procédure rigoureuse à respecter.

Les motifs recevables

Une fois la période d’essai écoulée, l’employeur ne peut rompre le contrat que pour des raisons sérieuses et légales. Les principaux motifs admis sont :

• Faute grave de l’apprenti (insubordination, absences injustifiées, comportement dangereux, etc.)
• Inaptitude médicale constatée par la médecine du travail
• Force majeure (évènement imprévisible rendant impossible la poursuite du contrat)
• Cessation d’activité de l’entreprise

Les motifs doivent être justifiés et proportionnés à la situation. Une simple mésentente ou un manque de motivation de l’apprenti ne suffit pas.

De plus, l’employeur n’a pas le droit de rompre un contrat d’apprentissage pour des raisons discriminatoires (origine, genre, orientation, handicap, etc.) ou en cas de harcèlement moral ou sexuel.

En cas de doute sur la légitimité du motif, il est recommandé de solliciter un conseil juridique ou de se rapprocher de l’OPCO ou de l’inspection du travail.

La procédure à suivre

La rupture du contrat à l’initiative de l’employeur suit une procédure stricte, dont les étapes doivent être soigneusement respectées :

• Informer l’apprenti de l’intention de rompre le contrat et des motifs envisagés.
• Convocation à un entretien préalable, si la rupture est envisagée pour faute grave.
• Entretien pour permettre à l’apprenti de s’expliquer.
• Décision formalisée par écrit, précisant clairement les raisons de la rupture.
• Notification par lettre recommandée avec accusé de réception, ou tout autre moyen conférant une date certaine.
• Transmission des documents de fin de contrat : certificat de travail, attestation Pôle emploi, solde de tout compte, etc.
• Information du CFA et de l’OPCO, ainsi que mise à jour des déclarations sociales et administratives.

L’ensemble des pièces et échanges doivent être archivés pour assurer une traçabilité en cas de recours ultérieur.

‍

Les cas de rupture à l’initiative de l’apprenti

Si l’alternance ne correspond plus à ses attentes ou si l’environnement de travail devient problématique, l’apprenti peut lui aussi décider de rompre son contrat. Là encore, des règles précises encadrent cette démarche pour éviter tout abus ou rupture précipitée.

Démission encadrée et obtention du diplôme

Une fois la période d’essai passée, un apprenti peut mettre fin à son contrat, mais sous certaines conditions bien définies :

• Il doit respecter un préavis d’au moins 7 jours calendaires, sauf disposition plus favorable prévue par la convention collective.
• La rupture doit être notifiée par écrit, idéalement par lettre recommandée avec accusé de réception, afin de prouver la date et le contenu de la démarche.

Un cas spécifique permet également la rupture du contrat :

L’obtention anticipée du diplôme.

Dans ce cas, l’apprenti peut mettre fin à son contrat avant la date initialement prévue, sous réserve de notifier son employeur par écrit.

Quelle que soit la situation, l’apprenti doit informer le CFA (Centre de Formation), qui pourra l’accompagner dans sa réorientation ou la poursuite de son parcours.

Rupture pour manquements de l’employeur

L’apprenti peut également demander la rupture du contrat en cas de manquements graves de l’employeur. Les principaux cas reconnus sont :

• Non-paiement de la rémunération
• Absence ou mauvaise qualité de la formation en entreprise
• Conditions de travail dégradées ou dangereuses
• Harcèlement, discrimination, ou environnement de travail toxique (voir notre article sur l’environnement de travail toxique)

Dans ce type de situation, il est essentiel de constituer un dossier avec des preuves écrites, témoignages ou échanges de mails.

Avant toute démarche unilatérale, il est fortement conseillé de :

• Solliciter le CFA ou un médiateur pour tenter une résolution amiable
• Saisir l’inspection du travail si nécessaire
• En cas d’échec, saisir le conseil de prud’hommes pour faire valoir ses droits

Cette procédure peut être longue et complexe, mais elle permet à l’apprenti de faire valoir ses droits tout en se protégeant juridiquement.

‍

La rupture d’un commun accord

Lorsqu’employeur et apprenti constatent que la collaboration ne fonctionne plus, ou que les objectifs du contrat ne sont plus alignés, ils peuvent choisir de mettre fin au contrat d’apprentissage d’un commun accord. Cette solution, souvent plus sereine, doit toutefois être encadrée et formalisée avec rigueur.

Sécuriser l’accord des parties

La rupture amiable repose sur une décision partagée. Pour qu’elle soit valable légalement, plusieurs conditions doivent être réunies :

• L’accord doit faire l’objet d’un écrit signé par l’apprenti et l’employeur.
• Ce document doit mentionner la date de rupture effective, les conditions de départ et les modalités de remise des documents (solde de tout compte, attestation Pôle emploi, certificat de travail, etc.).
• Le CFA et les organismes de financement (OPCO) doivent être informés dans les meilleurs délais afin d’éviter toute suspension administrative ou retard dans la prise en charge des droits.

L’écrit signé joue un rôle central : il sert de preuve incontestable en cas de désaccord ultérieur.

Organiser la transition

Pour garantir une rupture en douceur, il est recommandé d’anticiper les conséquences pratiques de la fin de contrat :

• Prévoir une période de transition si besoin (temps pour boucler une mission, organiser le relais avec un autre tuteur, etc.)
• Faire le point sur les droits de l’apprenti : jours de congé restants, rémunération due, éventuelles heures supplémentaires
• Conserver tous les échanges et documents relatifs à la rupture : mails, lettres, attestations

Enfin, le CFA peut accompagner l’apprenti dans la suite de son parcours, que ce soit pour trouver une nouvelle alternance (voir nos conseils pour trouver une alternance en urgence) ou revoir son projet professionnel.

‍

La rupture décidée par l’administration

Dans certains cas exceptionnels, la rupture du contrat d’apprentissage peut être décidée par l’administration, notamment lorsqu’il est constaté un manquement grave aux obligations légales ou contractuelles. Cette décision n’est jamais prise à la légère, mais vise à protéger l’apprenti ou à faire respecter le cadre réglementaire.

Cas d’intervention et procédures

L’administration peut intervenir dans plusieurs situations, notamment :

• Conditions de travail mettant en danger la santé ou la sécurité de l’apprenti
• Non-respect des engagements de formation de la part de l’entreprise
• Dysfonctionnement majeur dans l’encadrement ou l’accueil de l’apprenti
• Contrat non conforme aux règles en vigueur (durée, rémunération, alternance école/entreprise, etc.)

Dans ce cadre, une procédure stricte est suivie :

• Signalement auprès de l’inspection du travail, du CFA ou de l’OPCO.
• Enquête ou contrôle sur place, avec recueil des éléments auprès de l’employeur, de l’apprenti et du centre de formation.
• Analyse des faits par l’autorité administrative compétente (DREETS ou inspection du travail).
• Si des irrégularités sont constatées, notification de la décision de rupture par écrit à toutes les parties.

La décision prend alors effet à la date précisée dans la notification. Le contrat est rompu de plein droit, sans que l’une des parties puisse s’y opposer.

Cette rupture administrative entraîne les mêmes conséquences qu’une rupture classique :

• Obligation pour l’employeur de remettre les documents de fin de contrat
• Accompagnement de l’apprenti par le CFA ou Pôle emploi pour envisager la suite
• Éventuelle réorientation vers un autre contrat d’apprentissage ou une autre structure

Cette procédure vise principalement à protéger les jeunes face à des pratiques abusives, illégales ou dangereuses.

‍

Les délais à respecter, les notifications à établir et les documents à réunir

Rompre un contrat d’apprentissage implique de respecter des délais précis et de formaliser la démarche par écrit. Qu’il s’agisse d’une démission, d’un licenciement, d’un accord amiable ou d’une décision administrative, chaque cas de rupture obéit à des règles bien définies. Le non-respect de ces règles peut entraîner des litiges, voire l’annulation de la rupture.

Respecter les délais légaux et conventionnels

Voici les principaux délais à connaître selon le type de rupture :

• Pendant la période d’essai : pas de préavis légal obligatoire, mais un écrit est fortement recommandé.
• Démission de l’apprenti après la période d’essai : préavis de 7 jours calendaires minimum, sauf disposition plus favorable dans la convention collective.
• Licenciement à l’initiative de l’employeur : le délai dépend du motif, mais un entretien préalable est nécessaire pour faute grave.
• Rupture d’un commun accord : pas de délai imposé, mais il est préférable de fixer une date de fin précise.
• Décision administrative : le délai court à partir de la notification officielle.

Le point de départ du délai est toujours la date de réception de la notification par l’autre partie (courrier recommandé, remise en main propre contre signature, etc.).

Attention aux périodes de vacances scolaires ou de fermeture administrative, qui peuvent impacter les délais légaux. Il est toujours préférable d’anticiper.

Formaliser la rupture par écrit

La rupture d’un contrat d’apprentissage doit toujours être matérialisée par un écrit clair, daté et signé. Ce document doit :

• Être envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) ou tout autre moyen conférant une date certaine
• Mentionner les motifs de la rupture, la date de fin du contrat, ainsi que les éventuels droits ou obligations restants
• Joindre les pièces justificatives le cas échéant (certificat médical d’inaptitude, copie du diplôme obtenu, convention signée, etc.)

Il est également essentiel de :

• Conserver une copie du courrier et de l’accusé de réception
• Archiver tous les échanges liés à la rupture (emails, courriers, procès-verbaux d’entretien)
• Transmettre rapidement les documents de fin de contrat à l’apprenti : certificat de travail, solde de tout compte, attestation Pôle emploi

‍

Les conséquences pour chaque partie

Une fois le contrat d’apprentissage rompu, que ce soit à l’initiative de l’employeur, de l’apprenti ou d’un commun accord, chacune des parties doit remplir un certain nombre d’obligations. La rupture du contrat entraîne également des conséquences administratives, financières et professionnelles qu’il convient de bien anticiper.

Pour l’employeur

L’employeur est tenu de remettre l’ensemble des documents de fin de contrat dans les délais légaux. Il s’agit notamment de :

• Le certificat de travail
• L’attestation Pôle emploi
• Le solde de tout compte, incluant les rémunérations dues, les éventuelles indemnités et les congés non pris

D’autres démarches administratives sont également obligatoires :

• Informer les organismes concernés : CFA, OPCO, URSSAF, etc.
• Mettre à jour les déclarations sociales et les données liées au contrat (DSN, bulletins de paie)
• Archiver l’ensemble des pièces justificatives liées à la rupture

Sur le plan financier, l’employeur peut être amené à assumer certains coûts, notamment si la rupture est contestée ou jugée abusive. Il est donc essentiel de respecter scrupuleusement la procédure pour éviter tout contentieux.

Pour l’apprenti

De son côté, l’apprenti doit veiller à récupérer les documents nécessaires pour la suite de son parcours :

• Certificat de travail
• Bulletins de salaire
• Solde de tout compte

Une fois la rupture actée, il est vivement recommandé de contacter son CFA afin de :

• Évaluer les solutions de réorientation (recherche d’une nouvelle alternance, poursuite en formation initiale, etc.)
• Bénéficier d’un accompagnement personnalisé en cas de difficultés ou de rupture non prévue

Si l’apprenti souhaite rebondir rapidement, il peut consulter notre plateforme pour **voir nos offres en alternance** ou découvrir nos conseils pour trouver une alternance en urgence.

Enfin, selon les cas, l’apprenti peut ouvrir des droits auprès de Pôle emploi ou entamer d’autres démarches administratives (aide à la mobilité, aides sociales, etc.).

‍

Les recours possibles en cas de litige

Même en suivant les procédures, une rupture de contrat d’apprentissage peut donner lieu à des désaccords entre l’apprenti et l’employeur. Dans ce cas, plusieurs recours existent pour tenter de résoudre le litige de manière amiable, voire judiciaire si nécessaire. Il est essentiel de connaître ses droits et les bonnes démarches à entreprendre.

Les recours à l’amiable

Avant toute procédure contentieuse, la voie amiable est à privilégier. Elle permet souvent de régler le différend rapidement, sans frais et dans un climat plus serein.

Les solutions à envisager :

• Solliciter l’aide du CFA, qui joue souvent un rôle de médiateur entre l’apprenti et l’employeur
• Faire appel à un médiateur ou à l’inspection du travail, notamment en cas de non-respect des conditions de formation, de harcèlement ou de rupture abusive
• Engager une médiation formalisée, encadrée par un tiers neutre

Dans tous les cas :

• Il est crucial de formaliser les demandes par écrit (mails, lettres), en exposant les faits de manière précise
• Il faut conserver l’ensemble des échanges pour disposer de preuves en cas d’escalade du conflit
• Il convient de favoriser une solution équilibrée, respectueuse des intérêts des deux parties

Les voies judiciaires possibles

Si aucune solution amiable n’aboutit, il est possible de saisir le Conseil de prud’hommes, juridiction compétente pour trancher les litiges liés au contrat de travail, y compris les contrats d’apprentissage.

Pour engager une action en justice, il est recommandé de :

Constituer un dossier solide, comprenant :

• Une chronologie des faits
• Les échanges entre les parties
• Les pièces justificatives (contrat, lettres, bulletins, attestations, etc.)

Se faire accompagner par un avocat, un représentant syndical ou une permanence juridique si besoin

Attention : la procédure judiciaire peut être longue, coûteuse et incertaine. Elle doit donc être envisagée en dernier recours, une fois toutes les voies amiables épuisées.

‍

Conclusion

Rompre un contrat d’apprentissage est possible, mais nécessite de respecter un cadre légal strict. Qu’elle soit à l’initiative de l’apprenti, de l’employeur ou d’un commun accord, chaque rupture doit être justifiée, formalisée et notifiée dans les règles. En cas de doute ou de litige, des solutions amiables et judiciaires existent.

Besoin de rebondir ? Voir nos offres en alternance pour trouver rapidement une nouvelle opportunité.